Version courte des 10 exposés
Exposé n°1, 2 & 3
Le 1er exposé tente d’expliquer que le mode de fonctionnement d’une civilisation est assimilable à tout système complexe trouvé dans la Nature tel un organisme biologique ou même la biosphère. Nous invitons le lecteur à bien assimilé ce premier exposé. Il est fondamental pour comprendre le message de ce site. En conséquence, sa version courte ne sera pas si courte. Navré !
Dans les grandes lignes, nous pouvons dire que la complexité d’une civilisation croit en même temps que sa population (les éléments du système complexe) et cela d’autant plus que ses individus se différencient par leurs types d'activité, leurs hiérarchies, leurs fonctions, leurs spécialités ainsi que par la variété de leur production et de leur consommation.
Quand un système complexe croit, il s’organise spontanément en structures lesquelles, dans le cas d’une civilisation, représentent les groupes ethniques, les nations avec leurs systèmes politiques et socio-économiques, les religions, les systèmes de défense militaires et de sécurité interne, etc., etc..
S’ajoute à cela les systèmes de production et de consommation de biens et de services, les systèmes liés à l’alimentation, à la protection sociale, à la santé, à l’éducation, au transport et à la communication, à la culture etc., etc.. Plus les structures sont nombreuses, plus elles sont variées et plus le système est complexe.
Les structures ne sont jamais indépendantes. Elles sont interconnectées par des liens permettant la cohésion de l’ensemble complexe. Ils jouent un rôle important dans l'évolution et la survie des sociétés humaines.
Ils se présentent sous la forme d'une variété infinie de règles locales, nationales et internationales et de systèmes de communication. Le nombre et la variété des liens accroissent l’importance de la complexité du système. Dans les sociétés humaines, les liens sont gouvernés par la façon de penser et d'agir du groupe. Ce dernier engendrera un certain nombre d’actions physiques ou mentales. Par exemple: La conception du moteur à combustion interne était à l'origine une action mentale. La fabrication des véhicules qui ont suivi a été une action physique Pour éviter tout emballement du système, certaines rétroactions vont devoir agir en temps opportun pour s'opposer à la tendance, surtout lorsque cette dernière prend une forme exponentielle. Le nombre et la variété d’actions et de rétroactions s’ajoutent à la complexité du système.
Notre civilisation mondialisée a un degré de complexité jamais atteint dans l’histoire de l’humanité. De plus cette complexité est en croissance exponentielle. Outre le fait qu’elle devient de plus en plus difficile à être gérer par le génie humain ou voire même à s’autogérer, nous montrerons qu’elle va rencontrer d’autres obstacles physiques qui risque de la faire imploser.
En effet, et cela est important à comprendre, tout système complexe prend son origine nécessairement sur un autre système complexe dans lequel il puisera ses besoins matériels et énergétiques. Ce duo «parent-enfant» s’influence l’un et l’autre.
Les sociétés humaines, comme toutes les autres espèces biologiques, sont nées au sein du système complexe de la biosphère, elle-même composée de plusieurs millions d’autres espèces, qui sont autant d’autres sous-systèmes complexes devant partager les ressources et l'énergie fournies par la biosphère. La biosphère est dans ce cas le « système complexe-parent » de tous les systèmes complexes de nature biologique et que nous appellerons les «systèmes complexes-enfant ». Aucun de ces systèmes complexes n’est indépendant des autres, car rien dans la Nature ne peut exister par lui-même et pour lui-même.
Un système complexe biologique ou sociétal est obligatoirement en osmose avec le système sur lequel il est né en l’occurrence la biosphère. Pour garantir sa pérennité, la biosphère est dotée d’un équilibre instable évolutif. Si une espèce prend trop de place, son point d’équilibre se déplace, déclenchant des contre-réactions ou rétroactions, qui vont tendre à diminuer, voire inverser la croissance de l’espèce ou des espèces qui la menacent.
Le 2ème exposé nous dit qu’une civilisation, au même titre que tout système complexe a besoin, entre autres, d’un flux d’énergie pour exister. Ce flux peut être subdivisé en trois autres. Le premier permettra à la civilisation de faire croitre sa complexité, le deuxième à faire fonctionner son système et le troisième servira à réparer et remplacer ce que le temps aura inexorablement dégradé. La complexité engendre toujours plus de complexité pour autant que le système reçoive un flux d’énergie de croissance. Toutefois plus la complexité augmente plus les flux d’énergie de fonctionnement et d’entretien seront élevés. La condition nécessaire, bien que non suffisante, pour qu’une civilisation soit durable impose que le flux d’énergie à disposition puisse toujours satisfaire les flux d’énergies de fonctionnement et de maintenance de la civilisation. Si ces flux venaient à diminuer notablement au cours du temps, les risques d’effondrement s’accroitraient fortement. En conséquence, si une civilisation ayant atteint un certain niveau de complexité devient incapable de garantir au minimum un flux d’énergie constant dans le temps alors au mieux elle ne pourra plus croître en complexité et au pire elle s’effondrera. En corollaire, sachant que, dans un système fermé comme notre Terre, il n’est pas possible d’atteindre un flux d’énergie infini, le niveau de complexité de toute civilisation ne peut pas croitre indéfiniment.
La question est alors de savoir si, dans le futur, notre civilisation mondialisée saura ne plus faire croître sa complexité et la stabiliser. C’est seulement si elle le peut, et qu’en même temps elle puisse garantir chaque année le flux d’énergie permettant son entretien et son fonctionnement, qu’elle pourra prétendre être durable. Rien à ce jour ne nous permet de prétendre que notre civilisation puisse relever ce défi.
Le 3ème exposé s’attarde sur la genèse de la croissance de la complexité des sociétés humaines. Cette dernière aurait pris naissance dès le début du néolithique marqué par la sédentarisation progressive des sociétés humaines.
En devenant sédentaire l’Homme est entré dans l’engrenage de la croissance de la complexité de sa société. Il est contraint de progresser sans cesse non plus pour satisfaire les exigences de la Nature mais cette fois pour satisfaire ses propres exigences. Ces dernières s’avèrent sans limite. C’est à ce moment précis que la complexité des sociétés humaines entre dans la spirale croissante des progrès techniques, lesquelles engendrent à leur tour la croissance ininterrompue de nouveaux problèmes techniques, économiques et sociaux.
Les sociétés autrefois très peu complexes, vont maintenant progresser rapidement. Les premiers abris en dur voient petit à petit le jour. Les agglomérations grandissent pour devenir des villes favorisant les échanges d’idées, de pensées, de méthodes de travail, d’ambitions. L’Homme devient progressivement civilisé, c’est-à-dire l’homme des cités. Tout change alors très vite dans le domaine des mœurs, des connaissances, des idées, de l’art, de la politique et de la technique
Le fait de récolter plus que le besoin immédiat du groupe, tout comme la sédentarisation, va permettre une croissance démographique nécessaire pour accomplir toutes les tâches qu’entraine ce nouveau mode d’existence. Les surplus devront être protégés du pourrissement des prédateurs, et des convoitises. Il faudra trouver des moyens pour les stocker, de les conserver, de les transporter. Les échanges de surplus avec d’autres groupes entraineront à terme des systèmes d’écritures, arithmétiques et comptables
Les tâches de chacun devront se multiplier, se différencier, se spécialiser : préparer de nouvelles terre à cultiver, bâtir des lieux de stockage et des systèmes d’irrigation, construire et urbaniser des habitats. Il faudra aussi nommer des responsables, certains pour les échanges commerciaux et culturels, d’autres pour la protection des richesses par les armes.
La diversité des tâches impose des hiérarchies à la fois sur leur importance et par ricochet sur les individus qui les accomplissent, créant ainsi les classes sociales. Pour survivre, pour s’imposer sur les autres groupes, un esprit de compétition, devra se développer, créant ainsi une classification plus ou moins arbitraire de la valeur des biens, des services, des individus et des groupes. Cette hiérarchie de valeurs conduit aux notions du bien et du mal, du beau, du laid et du meilleur, dont une des conséquences sera la croissance des ego individuels et collectifs. Elle va aussi faire croitre l’insatisfaction permanente et exalter l’esprit de compétition. Ces derniers obligent à des améliorations constantes, mêmes si elles ne sont pas vitales ou même nécessaires. Cette recherche du toujours mieux, du plus fort, du plus beau, du plus spectaculaire finit par devenir un but en soi, une raison d’être, une sorte de culte qu’on appellera progrès, catalyseurs de toutes les croissances.
De nos jours, la croissance de la complexité de nos sociétés globalisées se fait en grande partie grâce à la spirale travail-production-consommation. Cette croissance a besoin de flux d'énergie mais aussi d'un solide système économique et financier. Ce dernier ne peut donc que croître aussi, ne serait-ce que pour assouvir des besoins grandissants créés par une publicité omniprésente et, d'autre part, à cause du jeu de la dette et de la croissance démographique.
Dans un monde ou tout doit se payer avec de l’argent, dans lequel plus personne ne peut vivre directement des largesses de la Nature pour assurer ses besoins vitaux, chacun se retrouve, de grès ou de force, inféodé à trouver un travail rétribuer financièrement. Notre pouvoir d’achat est le sésame par lequel les difficultés de notre existence matérielle s'aplanissent. Quasiment aucun de nous n’est prêt à se restreindre spontanément à ce niveau. La richesse appelle à toujours plus de richesses. En conséquence :
La croissance des activités humaines et donc la croissance de la complexité doivent être considérées comme une obligation pour éviter de graves troubles sociaux.
Cependant, la continuité de la croissance des activités humaines va avoir de graves conséquences toutes incompatibles avec le principe du développement durable comme nous le verrons dans les prochains exposés
Le 4ème exposé rappelle que, contrairement à la monnaie, il n'est pas possible de créer de l'énergie à partir de rien. Pour devenir une énergie utile à l'Homme, les énergies offertes gratuitement par la Nature (énergie primaire) doivent être transformées par des appareils coûteux à la fois en matière et en énergie. Toute énergie primaire offerte par la Nature comme le pétrole, le soleil ou le vent ne peut pas être transformée intégralement en énergie utile à l’Homme. Seule une fraction toujours inférieure à 100% le sera. De plus, le rapport entre l’énergie totale fournie au cours de l’existence d’une installation transformant une énergie primaire en une énergie utile et l’énergie qu’il aura fallu investir dans sa construction, son entretien et son démontage est évalué par ce qu’on appelle son EROEI. Plus la valeur du rapport EROEI est élevée, plus la transformation est intéressante au point de vue énergétique. Quand EROEI = 1, il n’y a plus aucun intérêt à transformer une énergie en une autre, puisqu’il faut dépenser autant d’énergie qu’il est possible de recevoir. C’est une opération à somme nulle.
Les dégâts portés à la biosphère sont proportionnels au cumul de la quantité d’énergie primaire transformée en énergie utile ainsi qu’au cumul d’énergie utile consommée. Ainsi, c’est la somme cumulée des activités humaines soutenues par les énergies exogènes qui perturbe l’équilibre de la biosphère et non l’utilisation d’une source d’énergie particulière. Le changement du point d’équilibre de la biosphère aura entre autres des conséquences sur le climat de la Terre, sur l’équilibre de la chaine alimentaire et en conséquence sur l’organisation des sociétés humaines.
Le 5ème exposé rappelle que toute extraction de richesses des entrailles de la Terre, et bien sûr aussi celles des énergies fossiles, subit la loi des rendements décroissants. Ceci signifie que, tôt ou tard, les taux annuel d'extraction de l’ensemble des combustibles fossiles vont passer par un maximum, suivi peut être par un plateau plus ou moins court, avant de diminuer fortement. L’ensemble des énergies fossiles (charbon plus pétrole et gaz conventionnels et non-conventionnels) représentent actuellement, et pour encore quelques décennies, environ 80 % du flux d’énergie consommé par le système complexe de notre civilisation mondialisée. Les autres 20 % proviennent principalement des énergies dites alternatives (hydroélectrique, biomasse, nucléaire et depuis peu éolienne, solaire, géothermique et autres). Ce sont l’ensemble de ces sources d’énergie qui, une fois le pic global d’extraction des énergies fossiles passé, devront au fur et à mesure compenser de manière synchrone les pertes d’énergies fossiles. Reste à savoir si cela fait partie du possible.
Le 6ème exposé fait le point sur l’évolution du flux mondial d’énergie utile issue du taux d’extraction de l’ensemble des énergies fossiles depuis 1875. Il donne aussi les prévisions des spécialistes sur l’évolution probable de ce flux d’énergie dans l’avenir. La progression très forte a commencé dès la fin de la deuxième guerre mondiale. Depuis 1960, elle augmente chaque année de près de 1200 TWh/an, pour atteindre un total d'environ 75,000 TWh/an à l'horizon 2012. La courbe rouge de la figure 6-1 montre qu’à partir de 1960, pour exploiter, développer et entretenir le système complexe de nos sociétés mondialisées, le flux d'énergie utile a dû augmenter chaque année de 1500 TWh/an. On aurait pu s'attendre à une croissance exponentielle parallèle à celle de l'ensemble des activités humaines, mais des progrès constants en matière d'efficacité énergétique ont transformé cette progression exponentielle en une progression linéaire. L'exploitation massive des combustibles fossiles a contribué à cette croissance à hauteur d'environ 1200 TWh/an. La différence de 300 TWh/an, a été fournie par les sources d'énergie dites "alternatives". Actuellement l’ensemble de nos sociétés mondialisées consomme un flux d’énergie utile de 100’000 TWh/an, soit cent mille milliards de kWh/an. Environ 20'000 TWh/an proviennent des énergies dites alternatives dont environ 1000 à 1500 TWh/an proviennent des énergies dites renouvelables
L’exploitation massive du pétrole et du gaz de schiste subira elle aussi la loi des rendements décroissants. Nous ne savons pas encore très bien quelle sera l’impact des énergies fossiles non-conventionnelles sur le flux mondial d’énergie utile. Il y a à ce sujet des prévisions hypothétiques, certaines plutôt optimistes, d’autres pessimistes. La figure 6-6 montre que, quel que soit l’hypothèse, optimiste ou pessimiste, le pic du flux d’énergie utile se situerait de toute façon dans la deuxième partie de ce siècle et que l’exploitation des énergies fossiles non conventionnelles ne déplacerait que peu ce pic. Il le serait de l’ordre de 30 à 35 ans dans le meilleur des cas, à seulement quelques années dans l’autre. La pente de la décroissance des flux d’énergie utile après les pics respectifs resterait elle toujours aussi pentue, de l’ordre de l’ordre de 2 à 4 %, ce qui voudrait dire une perte annuelle du flux d’énergie utile de l’ordre de 2000 à 6000 TWh/an.
Dans le 7ème exposé nous nous demandons si les techno sciences seront toujours en mesure de satisfaire les besoins énergétiques de l'ensemble des sociétés complexes mondialisés?
La réponse est certainement oui tant que le taux global d’extraction des énergies fossiles reste en croissance, c’est-à-dire au moins jusqu’à la deuxième partie de ce siècle. Au-delà du pic de ce taux d’extraction le problème pourrait devenir insurmontable.
Pour évaluer l’importance du défi à surmonter nous avons fait deux hypothèses raisonnables :
1°) Même après 2050, la survie de notre système économique mondial demandera un accroissement de flux d’énergie de l’ordre de 1500 TWh/an.
2°) la perte de flux d’énergie utile dans la deuxième partie de ce siècle serait au minimum de 2000 TWh/an.
Ainsi le génie humain devra au minimum compenser une perte annuelle de flux d’énergie de 3500 TWh/an par d'autres sources d'énergie, que nous appelons "sources d'énergies alternatives". C’est énorme ! A titre de comparaison cette accroissement serait actuellement de l’ordre de 300 TWh/an et celui attendu pour la prochaine décennie peut-être de l'ordre de 500 TWh/an. (Il est très difficile d’obtenir des valeurs non commerciales à ce sujet)
Si nous admettons comme raisonnables ces ordres de grandeurs, cela signifierait que l'industrie mondiale devrait être en mesure d'accroître, durant les 4 ou 6 prochaines décennies, le rythme de construction d’installations d’énergies alternatives, par un facteur d’environ 7, soit (3500/500), par rapport à ce qu’elle se sent capable de réaliser dans un proche avenir, ou par un facteur d'environ 12, soit (3500/300), par rapport à ce qu’elle peut produire aujourd'hui.
Peu probable que ce défi puisse être relevé en une période aussi courte que 40 ou 60 ans.
En résumé: Dès la deuxième moitié de ce siècle nous devrions nous attendre à une nette et durable baisse des flux d’énergie nécessaires à faire croître, fonctionner et entretenir l’ensemble des sociétés mondialisées.
Quelles en seront les conséquences ? Le système risque-t-il de s’effondrer par manque de flux d’énergie?
Le 8ème exposé se penche sur les risques encourus par notre civilisation si l’industrie mondiale était incapable de satisfaire les besoins mondiaux en énergie comme le suggère le 7ièm exposé.
Si cette prédiction devait se révéler exacte, nous devrions nous en inquiéter parce que cet événement aura un impact significatif et négatif sur les générations futures.
A quoi devrait-on s’attendre ? A ce que les futures générations reviennent au niveau de vie des années 50 ou 60, quand la consommation mondiale d'énergie était quatre fois plus faible que maintenant ? Pas si grave dirons certains. Le niveau de vie à cette époque n’était en fait pas si mauvais. Malheureusement ce n'est pas possible, car un système complexe est irréversible. En d'autres termes, les générations futures ne peuvent pas revivre ce que leurs ancêtres ont connu.
Peuvent-ils alors espérer que la complexité de notre civilisation diminuera suffisamment lentement pour permettre aux populations de s'adapter au nouveau flux d'énergie ? Cela pourrait bien être le cas au début de la décroissance des flux d'énergie. Mais, passé un certain seuil de manque chronique de ces flux, nos sociétés se détérioreront si rapidement qu’aucun ajustement ne sera plus possible. La civilisation se dégradera de plus en plus rapidement jusqu’à son effondrement total. Pourquoi ?
Parce que les flux d'énergie exogène consommés par la population mondiale peuvent être considérés comme des aides à l'existence. Cette aide se fait sous la forme de ce qu’on appelle parfois "les esclaves énergétiques". A partir d’environ 1850, l'humanité a commencé à exploiter de plus en plus massivement les combustibles fossiles. L'afflux croissant et rapide d'énergie exogène, qui a été absolument sans précédent dans l’histoire de l’humanité, a conduit à une augmentation proportionnelle des progrès techniques et sociaux (malheureusement pas toujours équitablement répartis). Toutefois, n’oublions pas que si des avancées techniques spectaculaires ont pu être réalisées, c’est parce que les " esclaves énergétiques " ont libéré certains humains de leurs dures tâches quotidiennes nécessaires à leur survie. Par conséquent, les progrès techniques ont suivi la même courbe ascendante que le taux annuel d'extraction des combustibles fossiles, en particulier celui du pétrole. Cette offre de flux énergétique exogène a permis d'améliorer notre alimentation, notre gestion de l'eau potable et des eaux usées, de rendre plus confortable et plus salubre nos habitats, de nous transporter rapidement d’un point à un autre sans grandes difficultés, etc., etc.. L’augmentation de nos connaissances en biologie, en médecine, en hygiène ainsi que dans les domaines de la chimie et de la physique ont conduit à une meilleure compréhension de la façon de lutter contre nos pires prédateurs (les bactéries et les virus) et de nous en protéger. Les progrès en technologie médicale ont permis de guérir des maladies autrefois incurables. Des progrès dans la production et la distribution alimentaire ont permis de réduire d’une manière significative les famines. Tout cela grâce aux « esclaves énergétiques »
C'est donc toutes ces avancées technologiques qui ont contribué à considérablement augmenter l'espérance de vie moyenne à la naissance de la population mondiale, ce qui a eu pour effet de l’augmenter.
Nous avons vu dans le 6ème exposé que le génie humain ne sera vraisemblablement pas en mesure de produire un flux d'énergie toujours croissant permettant cette croissance d'activité. Ce flux passera par un maximum (Figure 6-3) puis diminuera inexorablement, probablement déjà au cours de la seconde moitié de ce siècle. Le taux annuel de cette baisse pourrait être de l'ordre de 2 à 4%. A partir de ce moment, le nombre d'aides à l’existence, à savoir nos "esclaves énergétiques ", nous délaisseront les uns après les autres. Résultats: les structures sociétales des prochaines générations seront sérieusement endommagées, entraînant dans un premier temps des agitations sociales plus ou moins fortes, d’abord en différents points du globe pour se généraliser petit à petit à l'ensemble des sociétés complexes mondialisées. Les problèmes qui se feront de plus en plus pressants pour les prochaines générations seront de pouvoir remplir leurs assiettes chaque jour, d’avoir un accès facile à l'eau potable, de recevoir des soins en cas de maladie, de se déplacer sur de grandes distances pour trouver du travail ou de la nourriture, etc. De même, ils verront que les structures de la société seront de moins en moins capables d'assurer des emplois rémunérés, de distribuer des compensations pour les chômeurs, ni protéger la population contre les épidémies et autres fléaux. Ainsi, logiquement, l'espérance de vie moyenne des générations futures devrait progressivement diminuer et donc aussi la population mondiale. A priori, du fait que cette dernière suive le même schéma que celui des flux d'énergie consommés, nous pouvons craindre qu’une fois passé leur taux d’extraction maximum, la population mondiale diminuera chaque année d'au moins 2 à 4%. Supposons que, lorsque ces flux d'énergie vont commencer à diminuer, la population mondiale aura atteint 9 milliards d’individus. Si la diminution de la population annuelle moyenne devait être de l'ordre de 3 %, la population mondiale ne compterait pas plus d'un milliard d’individus en moins de trois générations (75 ans). Il est même possible que cette baisse soit encore plus brutale car elle est susceptible de s’accélérer par la destruction de structures économiques et sociales ainsi que des régimes d’Etats de droit.
En conclusion:
La question initiale était: Quels sont les risques encourus par notre civilisation si l’industrie mondiale est incapable de satisfaire les besoins mondiaux en énergie? La réponse est: une dégradation progressive de la complexité de notre civilisation mondiale conduisant à son effondrement.
Nous allons dans le 9ème exposé illustrer ce processus de destruction au sein d'un espace économique donné.
Dans un premier temps, la baisse des flux d'énergie peut avoir des effets semblables à ceux d'une récession économique, mais la comparaison s'arrête là, car les mécanismes en jeu sont différents. Les récessions économiques font généralement suite à une crise financière ou à l’éclatement d'une bulle d’un des secteurs économiques. Mais en général, ces crises ne sont pas liées à l'incapacité de produire en raison du manque de machines, de travailleurs, de matière première ou d’énergie. Le plus souvent elles prennent naissance quand l'offre est supérieure à la demande.
La situation est tout à fait différente lorsqu’une récession se transforme en dépression à cause d’une diminution permanente des flux d'énergie nécessaires au bon fonctionnement des sociétés. Dans ce cas, c’est la demande qui ne peut plus être satisfaite. La dépression se manifeste alors par le ralentissement toujours grandissant du triplet travail-production-consommation par faute d’énergie (et de matière première). Si, dans une crise économique, il est toujours possible de stimuler la consommation en injectant des capitaux créé à partir de rien, c'est-à-dire, en faisant marcher la machine à billet, il n'est pas possible de le faire avec l'énergie. En effet, comme nous l'avons vu dans le 4ème exposé, il n’est pas possible de créer de l'énergie à partir de rien.
Il n'y a donc pas de remède pour maîtriser ou atténuer ce type de récession qui va inévitablement converger vers une dépression économique permanente.
La baisse annuelle des flux d'énergie exogène, qui pourrait être de l'ordre de 2 à 6%, une fois le pic passé, se traduira par une augmentation immédiate du coût de l'énergie (toutes sources confondues), puis par une diminution progressive de la plupart des activités rétribuées dans les différents secteurs économiques.
Dans un premier temps, l'effet sera une augmentation du coût de la vie pour tout le monde avec une diminution correspondante de la consommation. Graduellement et progressivement, la baisse des flux d'énergie va entraîner la fermeture des grandes, moyennes et petites entreprises. De même, les services publics et tous autres services du tertiaire devront dans un premier temps licencier de plus en plus massivement puis, pour certains, fermer leur porte. Le taux de chômage grimpera en flèche. La diminution des activités salariées va faire dégringoler le PIB et simultanément les recettes de l’État. Les premiers affectés seront certainement les services sociaux. L’État deviendra donc de moins en moins efficace pour aider des foules de plus en plus dans le besoin par pertes de leurs revenus.
L'État sera alors obligé d’augmenter les impôts de ceux qui ont encore des revenus et des richesses. Afin de ne pas déclencher d’émeutes, l'État tentera d'emprunter autant que possible afin de relancer l'économie. Il ne trouvera malheureusement que peu de bailleurs de fonds prêts à risquer leur argent ou alors seulement à des taux très élevés. Le cercle vicieux de la dette et du ralentissement économique va commencer. Par la force des choses, même si, à ce moment, il y aura encore des régimes de gauche, nous devrions nous attendre à une forte réduction des prestations sociales pour les pauvres dont le nombre ne cessera d'augmenter. Les troubles sociaux qui en résulteront augmenteront la perte des libertés individuelles de chacun.
Le fossé entre riches et pauvres ne fera que se creuser d’avantage attisant encore plus l'instabilité sociale. Le marché noir, les grèves, les actes de vandalisme, les troubles civils, le banditisme, les abus de confiance et les escroqueries de toutes sortes seront en forte hausse. Le sentiment d'insécurité, la méfiance de chacun envers les autres se développera progressivement, rendant la vie quotidienne insupportable. Parce que tous ces facteurs sont absolument défavorables au développement économique, la dégradation de la situation ne fera que s’amplifier.
Les libertés individuelles vont se rétrécir comme peau de chagrin. Ce ne sera toutefois pas là une solution car les gouvernements vont devoir plier sous les dépenses pour contenir le peuple. L’augmentation des effectifs de la police, des troupes spéciales anti-émeute, la multiplication des lieux de détention vont coûter très cher. Peut-être même devra-t-il mobiliser des troupes à ses frontières pour se protéger d’agressions extérieures ou d'immigration massive et sauvage venant de régions encore plus défavorisées. L'argent dépensé pour maintenir ce semblant d'ordre se fera bien sûr au détriment du bien-être social, accélérant encore la destruction de structures privées et publiques. Certains organismes privés, certains professionnels, chercheront à se délocaliser, aggravant encore un peu plus la situation. Plus les années passeront, plus l'État deviendra exsangue financièrement, le forçant à limiter encore davantage ses dépenses pour l'aide au commerce, à l'industrie, à l’agriculture, à l’éducation, à la santé, à la prévention des épidémies, à l'aide au logement et de la famille. La différence de qualité de vie entre une minorité de privilégiés et une énorme foule de gens de plus en plus affamée, maltraitée, humiliée, désespérée, perdant toute confiance envers leur gouvernement, va atteindre son paroxysme et entrainer des révolutions sanguinaires.
Bien qu'il soit difficile de donner un scénario exact de ce qui pourrait arriver au juste, on peut imaginer qu’à ce stade, nous avons deux sortes de possibilités:
Première possibilité: Les révolutions ne résoudront rien. Elles seront suivies par d'autres révolutions toutes aussi désastreuses. Une multitude de seigneurs de guerre et de terroristes de toutes sortes vont se battre les uns contre les autres avec, comme conséquence, la destruction presque totale des structures de notre civilisation. On assistera vraisemblablement à un exode massif des populations, ainsi que des biens et des services. Tous vont essayer de converger vers les régions qui apparaissent en mesure de leur offrir une meilleure chance de survie. Ce faisant, ils pousseront leur région d'origine encore un peu plus vers le chaos, tout en affaiblissant les régions où ils auront choisi d’immigrer.
Les structures fournissant l'énergie, les matières premières minérales, les matériaux utiles, la nourriture et l'eau potable seront sérieusement endommagés. Cela devrait conduire à la résurgence de maladies infectieuses telles que la tuberculose, le choléra, la poliomyélite, l'hépatite virale, la peste, la lèpre, la fièvre jaune et bien d'autres encore. Les maladies sur lesquelles se concentrent aujourd'hui la recherche médicale, comme les cancers, les maladies cardiovasculaires et les maladies neurologiques, tels Alzheimer, ne représenteront plus un problème majeur car ces maladies dégénératives touchent essentiellement les populations âgées qui, à ce moment, se feront de plus en plus rares.
Souvenons-nous que nos systèmes complexes ne fonctionnent bien que si, comme il a été dit ici à plusieurs reprises, ils reçoivent les flux adéquats d’énergie et des matières premières. Mais ce n'est pas tout. Il faut encore que tout le monde soit présent à son poste de travail et avoir les qualifications requises pour faire son travail correctement. L'agitation sociale, l'augmentation de l'absentéisme dû aux maladies et au manque de soins, la désintégration du système de formation professionnelle et de toute l'infrastructure éducative, conduira à une situation où de moins en moins d’individus hautement qualifiés seront présents sur leur lieu de travail. Les conséquences économiques seront désastreuses, mais les conséquences écologiques le seront encore plus. En effet, imaginons ce qu’il pourrait arriver, par exemple, aux centrales nucléaires en l'absence d’un personnel suffisant et qualifié pour garantir un certain niveau de sécurité. La même chose vaut pour la sécurité aérienne, la sécurité alimentaire et de la qualité de l’eau, la sécurité du stockage des marchandises dangereuses, l'élimination et le recyclage des déchets de toutes sortes, etc. Des catastrophes du genre de Seveso, Bhopal, Tchernobyl ou Fukushima sont susceptibles de devenir nettement plus fréquentes. Il faut aussi s'attendre à d’autres désastres dus à d’importantes coupures de courants électriques provenant de déséquilibres dans les réseaux électriques. Ces black-out sont susceptibles de devenir de plus en plus fréquents, de plus longues durées et concerner des régions de plus en plus étendues. Ils entraîneront à leur tour d’autres désastres.
Parce que dans un système complexe tout est lié, le délitement d'une structure entraine nécessairement le délitement d’une autre et ainsi de suite accélérant ainsi le mouvement de destruction généralisée. A ce stade, il ne sera plus possible d'inverser la tendance. Il sera même trop tard pour l'arrêter. Tout va inexorablement évoluer vers la destruction complète du système.
Deuxième possibilité. Certaines puissances économiques et industrielles, non encore dans la tourmente, peuvent craindre des immigrations massives de populations en détresse et une destruction indirecte de leur système économique. Pour s’en protéger, ils pourraient procéder à une invasion «préventive» des zones en détresse et les coloniser à leur propre avantage. Toutefois, en raison d'un flux global d’énergie de plus en plus faible, il ne sera plus possible, comme aujourd'hui, de reconstruire les pays envahis puis les transformer en un fidèle partenaire commercial. L’envahisseur ne pourra agir que comme un colonisateur et traiter les populations soumises que comme des esclaves. Il utilisera ce qui reste de la richesse de ces pays à son profit exclusif.
Ce genre de situation risque de durer aussi longtemps que l’envahisseur reste fort sur tous les fronts. Au moindre signe de faiblesse, les populations soumises se révolteront en détruisant tout, jusqu'à ce qu’une autre puissance intervienne pour mettre tout le monde sous son autorité. Ainsi, étape par étape, le chaos va s'étendre à différentes parties du monde civilisé. Le commerce mondial, sur lequel est basé la prospérité de notre civilisation industrielle ne sera plus possible dans ce monde chaotique. Il y a un risque que les dernières grandes puissances encore préservées, cherchent à imposer leur suprématie pour dominer le globe entraînant le monde entier dans une guerre apocalyptique qui mettrait un point final à cette civilisation et peut-être même à l’humanité.
Bien que ces deux scénarios ne soient pas certains, ils sont loin d'être impossibles, surtout si rien n'est fait pour les prévenir. Quoi qu'il en soit, ce qui pourrait arriver dans l'avenir n'est pas quelque chose que nous pouvons prouver ou réfuter. Le seul fait que ce qui a été décrit ici soit du domaine du possible, nous oblige à évaluer cette probabilité et appliquer le principe de précaution. L’enjeu est trop élevé pour ne rien entreprendre.
Les arguments pour ne pas croire à une telle catastrophe sont souvent le reflet de nos peurs et de nos lâchetés devant des dangers qui nous dépassent. Nous préférons les nier plutôt que d'y faire face. Et puis, il y a notre foi inébranlable dans les miracles, que ce soit ceux que Dieu pourrait nous gratifier dans sa grande miséricorde ou, plus communément de nos jours, grâce au génie humain qui, s’il est capable d’être à l’origine de catastrophes, il aurait aussi le pouvoir de les réparer. L'argument suivant est fréquemment avancé: «L'histoire nous a montré que nous ne pouvons pas prévoir longtemps à l'avance ce que le génie humain peut encore nous réserver pour nous sauver. Ainsi, faisons lui confiance et arrêtons de faire des prédictions non constructives qui minent le moral de tout le monde."
D'où la question: Et si le génie humain était en effet capable de garantir en permanence le flux d'énergie suffisant pour que notre civilisation puisse continuer à se développer ad aeternam. Serait- elle sauvée pour autant?
Le 10ème exposé cherche à répondre à cette question.
Rappelons-nous le 1er exposé où il était dit que :
Tout nouveau système complexe (appelé «enfant») prend nécessairement naissance sur un autre système complexe (appelée «parent»), sur lequel il tirera son énergie et ses ressources matérielles pour se développer.
Le « système complexe-parent » de toutes les sociétés humaines (est la biosphère. Ce duo parent-enfant (biosphère-sociétés humaines civilisées) interagit étroitement l'un avec l’autre. Le « système complexe – parent » a généralement suffisamment de moyens pour éviter que le « système complexe-enfant » ne dépasse certaines limites qui le mettrait en danger.
La complexité des sociétés humaines a pu croître grâce à l'énergie et à la matière première extraites de la biosphère, ce qui signifie que la croissance de la complexité des sociétés humaines s'est faite aux détriments de la biosphère.
Si les sociétés s’étaient limitées à n’utiliser que l'énergie endogène humaine, comme dans les sociétés non complexes, leur impact sur la biosphère ne serait pas devenu une nuisance. Bien au contraire.
Il en va tout autrement quand les sociétés humaines devenues civilisées se sont détachées des lois de la Nature et se sont crues autorisées à puiser allègrement dans la biosphère les énergies et les matériaux dont elles avaient besoin pour satisfaire l’orgueil et l’ego de quelques un de ses représentants.
Les mécanismes par lesquels ces sociétés vont perturber l’environnement sont extrêmement nombreux. Nous allons essayer de les classer en catégories, mais il faut garder en mémoire qu’elles ne forment en aucun cas des ensembles disjoints. Supprimer un seul de ces mécanismes nuisibles entrainerait un déséquilibre qui endommagerait ou même détruirait l’ensemble de la civilisation.
Parmi les dommages causés à la biosphère par l’Homme civilisé citons par exemple:
Ceux causés par une population mondiale toujours croissante.
Nous avons discuté dans le 8ème exposé que l’augmentation de la population était en partie due à une augmentation de l'espérance de vie à la naissance, elle-même liée aux progrès techniques qui, à leurs tours, sont liées à l’augmentation du flux d'énergie exogène par personne. Tant que les techno sciences seront en mesure de répondre à cette demande de progrès, la population mondiale augmentera, du moins jusqu’à un certain point. A terme, le problème de nourrir correctement cette population mondiale, sans détruire gravement l'environnement, pourrait devenir un impossible défi. Ceci peut être vu comme une contre réaction de la biosphère.
Ceux causés par les abondantes transformations d'énergie primaire en énergie utile, et par celles de matière primaire en matière utile.
Nous avons vu dans le 4ème exposé que la transformation d’une énergie primaire en une énergie utile produisait une proportion considérable de produits non désirés. Ces produits vont envahir l’environnement et perturber la biosphère tout comme ceux issus de la transformation d’une matière première primaire en matière utile.
La pollution due à l’extraction des énergies fossiles est connue de quasi tout le monde car fortement médiatisée. Moins médiatisées sont les pollutions minières et le traitement des minerais jusqu’à obtenir le produit désiré. Des masses extraites des entrailles de la Terre, moins de 1% deviennent un produit utile. Le reste est déversé dans l’écosystème qui cachait dans son sous-sol le produit recherché par l’Homme. Ces déchets miniers contiennent de nombreux produits toxiques pour l’Homme tels les métaux lourds, l’arsenic, des matières radioactives et autres.
Mais l’agression à la biosphère ne s’arrête pas là. Il nous faut encore ajouter :
Ceux causés par l'utilisation des énergies utiles et des matières utiles
Le flux d’énergie utile et le flux de production de matières utiles vont venir nourrir le flux de la production industrielle nécessaire à la survie de notre civilisation. Par exemple l’industrie mondiale a déjà mis sur le marché des millions de produits physico-chimiques représentant des milliards de tonnes de produits plastiques, pharmaceutiques, cosmétiques, électroniques et autres. Selon le principe universel énonçant que rien ne se perd, rien ne se crée mais tout se transforme, ce qui a été fabriqué artificiellement se retrouvera, tôt ou tard, sous une forme ou une autre, dans l’environnement naturel. Beaucoup de ces produits sont toxiques pour les éléments et les structures de la biosphère tels les biotopes avec ses plantes, ses organismes biologiques et son réseau trophique, y compris bien sûr pour l’Homme. Ces produits artificiels ne restent pas là où ils ont été produits, utilisés ou jetés mais se déplacent sur de grandes distances par l’érosion, les animaux, les poissons, le vent, etc.. Certains, comme les métaux lourds, les PCB, les furanes, la dioxine, etc…, ont des demi-vies suffisamment longues pour permettre leur accumulation dans certains organismes, diminuant soit leur espérance de vie, soit entraînant carrément leur disparition. La contamination de ces organismes peut aussi les rendre impropres à la consommation et ainsi perturber la chaîne alimentaire dont, rappelons-le, l’Homme en est son dernier maillon.
Ceux causés par des espèces envahissantes exogènes.
Ces espèces, souvent bien malgré elles, dérèglent plus ou moins gravement plusieurs biotopes. Pour satisfaire les exigences de l’économie mondialisée, les échanges de biens, de services et de personnes ont nécessité un immense réseau de transport par mer, air et terre. Il faut savoir que chaque année plus d’un milliard de passagers effectuent des vols internationaux et que des milliards de tonnes sont transportés sur les mers et les océans. S’ajoute à cela d’autres milliards de tonnes de marchandises transportées par voie fluviale, par la route et le rail.
Dans les bagages des passagers et dans les marchandises transportées se trouvent, volontairement ou involontairement, des espèces potentiellement envahissantes telles des bactéries, des virus, insectes, animaux et plantes de toutes sortes qui sont autant d’éléments exogènes à leur point d’arrivée. Certaines de ces espèces peuvent devenir envahissantes et détruire ou perturber gravement des espèces indigènes du biotope récepteur.
Ceux causés par une surexploitation des ressources biologiques pour satisfaire la production mondiale alimentaire et sa distribution dans la population mondiale.
Les ressources biologiques qui constituent la chaine alimentaire, normalement renouvelables, sont exploitées avec une telle intensité qu’elles n’ont plus le temps de se reconstituer, qu’il s’agisse de terres cultivables, de forêts, de pêcheries, de pâturages ou de nappes phréatiques.
Il est estimé qu’au cours de ces 40 prochaines années, l’accroissement de 30% de la population humaine, occupant de plus en plus d’espace sur cette Terre, va faire perdre à lui seul 30% des terres cultivables. S’ajoute à cela les déséquilibres croissants du réseau trophique, en particulier par l’emploi massif d’intrants (engrais, désherbants, insecticides et pesticides) combinés à de mauvaises gestions des sols, en particulier en les laissant nus une bonne partie de l’année, entrainant leur salinisation et leur stérilisation à terme. Pour les mêmes raisons, de grandes surfaces de terres arables sont perdus par érosion.
Mais ce n’est pas tout. Les méthodes d’agriculture intensive ont tendance à appauvrir les sols par le non-respect des cycles naturels qui veut que la dégradation des végétaux serve à maintenir la quantité de nutriments absolument nécessaire au métabolisme des organismes tels par exemple, les oligoéléments (iode, fluor, fer, cuivre) et d’autres éléments comme le magnésium, le phosphore, le sélénium. Ces nutriments ne se retrouveront plus en concentration suffisante dans les plantes et donc dans notre alimentation. Ils jouent toutefois un rôle important pour notre santé. Ainsi, même si une alimentation pouvait sembler correcte en termes de calories, ou de quantité, elle peut être néanmoins équivalente à une malnutrition, si elle ne contient pas en suffisance ces éléments.
Parvenir à une production durable et mondialisée de la nourriture et de l'eau potable est devenue de plus en plus difficile en raison du nombre d'acteurs impliqués et leur interférence. En effet, les relations entre financiers, industries, producteurs, consommateurs et travailleurs deviennent terriblement compliquées en raison de nombreuses lois nationales et internationales. Celles-ci régissent les droits du commerce international et de la concurrence. Elles régissent encore la protection de la propriété intellectuelle sur les substances biologiques (comme les graines), les subventions aux agriculteurs, les règles sanitaires, la protection des travailleurs, etc. Elles imposent également des limites au commerce équitable, aux échanges Nord-Sud et à de nombreuses autres contraintes. Toutes ces limitations administratives rendent toute réforme rapide et profonde très difficile, voire impossible.
Plus grave encore est l’utilisation des terres agricoles et de ses produits comme de pures produits financiers et non plus comme des produits vitaux pour tout le monde. Les récoltes agricoles sont devenus des produits boursiers, et un marché juteux pour les Hedge Funds, les cartels des semenciers, des produits phytosanitaires et de l’industrie agroalimentaire ainsi que les industries spécialisées dans la transformation génétique des plantes (OGM). Cette politique entraîne déjà des famines dans certaines régions du monde, mais pourrait bien à terme se généraliser jusque dans les pays riches.
Exemples d'autres actions humaines endommageant la biosphère avec pour effet d’en réduire sa complexité.
Une fois passé un certain seuil, mal connu de l'Homme, la biosphère va réagir contre le « système complexe-enfant », à savoir la civilisation mondiale. Ainsi:
La perte constante de la complexité biosphérique va déclencher plusieurs rétroactions qui s'opposeront à l'expansion de la civilisation.
Parmi ces rétroactions il y a celle largement reconnue: les changements climatiques.
Première rétroaction
Le fait que les activités humaines puissent modifier les climats ne devrait pas nous surprendre! Si les activités humaines modifient la biosphère en diminuant son niveau de complexité alors il est naturel que les climats changent aussi puisque dans la Nature tout est lié. Ce point est d'ailleurs en accord qualitatif avec ce que prédit la théorie des flux d'énergie dans les systèmes complexes.
Il est généralement admis que les changements climatiques auront des effets négatifs importants sur la taille de la population de nombreuses espèces innocentes, mais surtout sur la nôtre qui a déclenché cette rétroaction.
Politiciens et économistes craignent les changements climatiques car, d'après les prévisions du GIEC, ils induiraient de graves fléaux tels l'élévation du niveau des mers, des cyclones à répétition, des destructions de récoltes, etc. Les désastres matériels et humains pourraient déclencher un effondrement économique mondial, ce qu’ils ne peuvent accepter. Pour eux, la cause principale est l’augmentation des gaz à effet de serre anthropiques. Ces derniers alors investissent massivement dans la recherche et le développement pour diminuer cette concentration. Dans cette approche, il s’agit de remplacer les énergies fossiles par des énergies alternatives sans pour autant réduire le total des activités humaines. Outre le fait que, d’après le 8 ème exposé, ceci ne soit pas réalisable, notre système économique mondial ne nous permet pas de diminuer notablement la somme des activités humaines sans s’effondrer. Ainsi la contre réaction de la biosphère aura lieu d’une manière ou d’une autre. Soit la civilisation mondialisée s’auto détruit par manque de flux d’énergie, soit elle est détruite par les changements climatiques ou plus généralement par un changement du point d’équilibre de la biosphère qui détruira la civilisation industrialisée mondiale.
Mais les changements climatiques ne représentent pas la seule rétroaction de la biosphère contre la croissance de la civilisation.
Une autre rétroaction se déclenchera quand la demande de la civilisation mondialisée dépassera ce que la biosphère peut lui offrir sur le long terme.
Si le génie humain était capable d'alimenter en énergie, et d’une manière durable, l'ensemble des sociétés complexes mondialisées, il faudrait alors s'attendre à une augmentation constante de la population mondiale (voir 8ème exposé). Elle entraînera une augmentation de la demande en flux d'énergie utile et en flux de besoins vitaux comme la nourriture et l'eau potable.
Dès lors, il s'en suivra une rapide réduction de la population mondiale. Le système économique, qui ne peut survivre que s'il est en croissance, sera fortement ébranlé par manque de producteurs et de consommateurs solvables. Viendra alors s'ajouter une dépression économique toujours plus profonde qui conduira à des révoltes et à des guerres. Des mécanismes proches de ceux décrits dans 9ème exposé contribueront à l'effondrement de toute la civilisation mondiale.
Ainsi les rétroactions de la biosphère (le système complexe-parent) auront rempli leurs fonctions régulatrices. Elles auront réduit ou annulé les prétentions d'extension du système complexe-enfant (la civilisation). La biosphère se stabilisera vers un nouveau point d'équilibre dont notre civilisation, telle qu'elle fonctionne actuellement, sera exclue.
En conclusion :
Trouver de nouvelles sources d'énergie pour compenser les pertes d'énergies fossiles est loin d'être la solution, car cela ne réduira pas le montant des activités humaines qui est la cause première de la modification de la biosphère. Ainsi, vouloir maintenir ou pire accroître encore notre consommation d'énergie exogène conduira indubitablement à l'effondrement de notre civilisation.
Dans les grandes lignes, nous pouvons dire que la complexité d’une civilisation croit en même temps que sa population (les éléments du système complexe) et cela d’autant plus que ses individus se différencient par leurs types d'activité, leurs hiérarchies, leurs fonctions, leurs spécialités ainsi que par la variété de leur production et de leur consommation.
Quand un système complexe croit, il s’organise spontanément en structures lesquelles, dans le cas d’une civilisation, représentent les groupes ethniques, les nations avec leurs systèmes politiques et socio-économiques, les religions, les systèmes de défense militaires et de sécurité interne, etc., etc..
S’ajoute à cela les systèmes de production et de consommation de biens et de services, les systèmes liés à l’alimentation, à la protection sociale, à la santé, à l’éducation, au transport et à la communication, à la culture etc., etc.. Plus les structures sont nombreuses, plus elles sont variées et plus le système est complexe.
Les structures ne sont jamais indépendantes. Elles sont interconnectées par des liens permettant la cohésion de l’ensemble complexe. Ils jouent un rôle important dans l'évolution et la survie des sociétés humaines.
Ils se présentent sous la forme d'une variété infinie de règles locales, nationales et internationales et de systèmes de communication. Le nombre et la variété des liens accroissent l’importance de la complexité du système. Dans les sociétés humaines, les liens sont gouvernés par la façon de penser et d'agir du groupe. Ce dernier engendrera un certain nombre d’actions physiques ou mentales. Par exemple: La conception du moteur à combustion interne était à l'origine une action mentale. La fabrication des véhicules qui ont suivi a été une action physique Pour éviter tout emballement du système, certaines rétroactions vont devoir agir en temps opportun pour s'opposer à la tendance, surtout lorsque cette dernière prend une forme exponentielle. Le nombre et la variété d’actions et de rétroactions s’ajoutent à la complexité du système.
Notre civilisation mondialisée a un degré de complexité jamais atteint dans l’histoire de l’humanité. De plus cette complexité est en croissance exponentielle. Outre le fait qu’elle devient de plus en plus difficile à être gérer par le génie humain ou voire même à s’autogérer, nous montrerons qu’elle va rencontrer d’autres obstacles physiques qui risque de la faire imploser.
En effet, et cela est important à comprendre, tout système complexe prend son origine nécessairement sur un autre système complexe dans lequel il puisera ses besoins matériels et énergétiques. Ce duo «parent-enfant» s’influence l’un et l’autre.
Les sociétés humaines, comme toutes les autres espèces biologiques, sont nées au sein du système complexe de la biosphère, elle-même composée de plusieurs millions d’autres espèces, qui sont autant d’autres sous-systèmes complexes devant partager les ressources et l'énergie fournies par la biosphère. La biosphère est dans ce cas le « système complexe-parent » de tous les systèmes complexes de nature biologique et que nous appellerons les «systèmes complexes-enfant ». Aucun de ces systèmes complexes n’est indépendant des autres, car rien dans la Nature ne peut exister par lui-même et pour lui-même.
Un système complexe biologique ou sociétal est obligatoirement en osmose avec le système sur lequel il est né en l’occurrence la biosphère. Pour garantir sa pérennité, la biosphère est dotée d’un équilibre instable évolutif. Si une espèce prend trop de place, son point d’équilibre se déplace, déclenchant des contre-réactions ou rétroactions, qui vont tendre à diminuer, voire inverser la croissance de l’espèce ou des espèces qui la menacent.
Le 2ème exposé nous dit qu’une civilisation, au même titre que tout système complexe a besoin, entre autres, d’un flux d’énergie pour exister. Ce flux peut être subdivisé en trois autres. Le premier permettra à la civilisation de faire croitre sa complexité, le deuxième à faire fonctionner son système et le troisième servira à réparer et remplacer ce que le temps aura inexorablement dégradé. La complexité engendre toujours plus de complexité pour autant que le système reçoive un flux d’énergie de croissance. Toutefois plus la complexité augmente plus les flux d’énergie de fonctionnement et d’entretien seront élevés. La condition nécessaire, bien que non suffisante, pour qu’une civilisation soit durable impose que le flux d’énergie à disposition puisse toujours satisfaire les flux d’énergies de fonctionnement et de maintenance de la civilisation. Si ces flux venaient à diminuer notablement au cours du temps, les risques d’effondrement s’accroitraient fortement. En conséquence, si une civilisation ayant atteint un certain niveau de complexité devient incapable de garantir au minimum un flux d’énergie constant dans le temps alors au mieux elle ne pourra plus croître en complexité et au pire elle s’effondrera. En corollaire, sachant que, dans un système fermé comme notre Terre, il n’est pas possible d’atteindre un flux d’énergie infini, le niveau de complexité de toute civilisation ne peut pas croitre indéfiniment.
La question est alors de savoir si, dans le futur, notre civilisation mondialisée saura ne plus faire croître sa complexité et la stabiliser. C’est seulement si elle le peut, et qu’en même temps elle puisse garantir chaque année le flux d’énergie permettant son entretien et son fonctionnement, qu’elle pourra prétendre être durable. Rien à ce jour ne nous permet de prétendre que notre civilisation puisse relever ce défi.
Le 3ème exposé s’attarde sur la genèse de la croissance de la complexité des sociétés humaines. Cette dernière aurait pris naissance dès le début du néolithique marqué par la sédentarisation progressive des sociétés humaines.
En devenant sédentaire l’Homme est entré dans l’engrenage de la croissance de la complexité de sa société. Il est contraint de progresser sans cesse non plus pour satisfaire les exigences de la Nature mais cette fois pour satisfaire ses propres exigences. Ces dernières s’avèrent sans limite. C’est à ce moment précis que la complexité des sociétés humaines entre dans la spirale croissante des progrès techniques, lesquelles engendrent à leur tour la croissance ininterrompue de nouveaux problèmes techniques, économiques et sociaux.
Les sociétés autrefois très peu complexes, vont maintenant progresser rapidement. Les premiers abris en dur voient petit à petit le jour. Les agglomérations grandissent pour devenir des villes favorisant les échanges d’idées, de pensées, de méthodes de travail, d’ambitions. L’Homme devient progressivement civilisé, c’est-à-dire l’homme des cités. Tout change alors très vite dans le domaine des mœurs, des connaissances, des idées, de l’art, de la politique et de la technique
Le fait de récolter plus que le besoin immédiat du groupe, tout comme la sédentarisation, va permettre une croissance démographique nécessaire pour accomplir toutes les tâches qu’entraine ce nouveau mode d’existence. Les surplus devront être protégés du pourrissement des prédateurs, et des convoitises. Il faudra trouver des moyens pour les stocker, de les conserver, de les transporter. Les échanges de surplus avec d’autres groupes entraineront à terme des systèmes d’écritures, arithmétiques et comptables
Les tâches de chacun devront se multiplier, se différencier, se spécialiser : préparer de nouvelles terre à cultiver, bâtir des lieux de stockage et des systèmes d’irrigation, construire et urbaniser des habitats. Il faudra aussi nommer des responsables, certains pour les échanges commerciaux et culturels, d’autres pour la protection des richesses par les armes.
La diversité des tâches impose des hiérarchies à la fois sur leur importance et par ricochet sur les individus qui les accomplissent, créant ainsi les classes sociales. Pour survivre, pour s’imposer sur les autres groupes, un esprit de compétition, devra se développer, créant ainsi une classification plus ou moins arbitraire de la valeur des biens, des services, des individus et des groupes. Cette hiérarchie de valeurs conduit aux notions du bien et du mal, du beau, du laid et du meilleur, dont une des conséquences sera la croissance des ego individuels et collectifs. Elle va aussi faire croitre l’insatisfaction permanente et exalter l’esprit de compétition. Ces derniers obligent à des améliorations constantes, mêmes si elles ne sont pas vitales ou même nécessaires. Cette recherche du toujours mieux, du plus fort, du plus beau, du plus spectaculaire finit par devenir un but en soi, une raison d’être, une sorte de culte qu’on appellera progrès, catalyseurs de toutes les croissances.
De nos jours, la croissance de la complexité de nos sociétés globalisées se fait en grande partie grâce à la spirale travail-production-consommation. Cette croissance a besoin de flux d'énergie mais aussi d'un solide système économique et financier. Ce dernier ne peut donc que croître aussi, ne serait-ce que pour assouvir des besoins grandissants créés par une publicité omniprésente et, d'autre part, à cause du jeu de la dette et de la croissance démographique.
Dans un monde ou tout doit se payer avec de l’argent, dans lequel plus personne ne peut vivre directement des largesses de la Nature pour assurer ses besoins vitaux, chacun se retrouve, de grès ou de force, inféodé à trouver un travail rétribuer financièrement. Notre pouvoir d’achat est le sésame par lequel les difficultés de notre existence matérielle s'aplanissent. Quasiment aucun de nous n’est prêt à se restreindre spontanément à ce niveau. La richesse appelle à toujours plus de richesses. En conséquence :
La croissance des activités humaines et donc la croissance de la complexité doivent être considérées comme une obligation pour éviter de graves troubles sociaux.
Cependant, la continuité de la croissance des activités humaines va avoir de graves conséquences toutes incompatibles avec le principe du développement durable comme nous le verrons dans les prochains exposés
Le 4ème exposé rappelle que, contrairement à la monnaie, il n'est pas possible de créer de l'énergie à partir de rien. Pour devenir une énergie utile à l'Homme, les énergies offertes gratuitement par la Nature (énergie primaire) doivent être transformées par des appareils coûteux à la fois en matière et en énergie. Toute énergie primaire offerte par la Nature comme le pétrole, le soleil ou le vent ne peut pas être transformée intégralement en énergie utile à l’Homme. Seule une fraction toujours inférieure à 100% le sera. De plus, le rapport entre l’énergie totale fournie au cours de l’existence d’une installation transformant une énergie primaire en une énergie utile et l’énergie qu’il aura fallu investir dans sa construction, son entretien et son démontage est évalué par ce qu’on appelle son EROEI. Plus la valeur du rapport EROEI est élevée, plus la transformation est intéressante au point de vue énergétique. Quand EROEI = 1, il n’y a plus aucun intérêt à transformer une énergie en une autre, puisqu’il faut dépenser autant d’énergie qu’il est possible de recevoir. C’est une opération à somme nulle.
Les dégâts portés à la biosphère sont proportionnels au cumul de la quantité d’énergie primaire transformée en énergie utile ainsi qu’au cumul d’énergie utile consommée. Ainsi, c’est la somme cumulée des activités humaines soutenues par les énergies exogènes qui perturbe l’équilibre de la biosphère et non l’utilisation d’une source d’énergie particulière. Le changement du point d’équilibre de la biosphère aura entre autres des conséquences sur le climat de la Terre, sur l’équilibre de la chaine alimentaire et en conséquence sur l’organisation des sociétés humaines.
Le 5ème exposé rappelle que toute extraction de richesses des entrailles de la Terre, et bien sûr aussi celles des énergies fossiles, subit la loi des rendements décroissants. Ceci signifie que, tôt ou tard, les taux annuel d'extraction de l’ensemble des combustibles fossiles vont passer par un maximum, suivi peut être par un plateau plus ou moins court, avant de diminuer fortement. L’ensemble des énergies fossiles (charbon plus pétrole et gaz conventionnels et non-conventionnels) représentent actuellement, et pour encore quelques décennies, environ 80 % du flux d’énergie consommé par le système complexe de notre civilisation mondialisée. Les autres 20 % proviennent principalement des énergies dites alternatives (hydroélectrique, biomasse, nucléaire et depuis peu éolienne, solaire, géothermique et autres). Ce sont l’ensemble de ces sources d’énergie qui, une fois le pic global d’extraction des énergies fossiles passé, devront au fur et à mesure compenser de manière synchrone les pertes d’énergies fossiles. Reste à savoir si cela fait partie du possible.
Le 6ème exposé fait le point sur l’évolution du flux mondial d’énergie utile issue du taux d’extraction de l’ensemble des énergies fossiles depuis 1875. Il donne aussi les prévisions des spécialistes sur l’évolution probable de ce flux d’énergie dans l’avenir. La progression très forte a commencé dès la fin de la deuxième guerre mondiale. Depuis 1960, elle augmente chaque année de près de 1200 TWh/an, pour atteindre un total d'environ 75,000 TWh/an à l'horizon 2012. La courbe rouge de la figure 6-1 montre qu’à partir de 1960, pour exploiter, développer et entretenir le système complexe de nos sociétés mondialisées, le flux d'énergie utile a dû augmenter chaque année de 1500 TWh/an. On aurait pu s'attendre à une croissance exponentielle parallèle à celle de l'ensemble des activités humaines, mais des progrès constants en matière d'efficacité énergétique ont transformé cette progression exponentielle en une progression linéaire. L'exploitation massive des combustibles fossiles a contribué à cette croissance à hauteur d'environ 1200 TWh/an. La différence de 300 TWh/an, a été fournie par les sources d'énergie dites "alternatives". Actuellement l’ensemble de nos sociétés mondialisées consomme un flux d’énergie utile de 100’000 TWh/an, soit cent mille milliards de kWh/an. Environ 20'000 TWh/an proviennent des énergies dites alternatives dont environ 1000 à 1500 TWh/an proviennent des énergies dites renouvelables
L’exploitation massive du pétrole et du gaz de schiste subira elle aussi la loi des rendements décroissants. Nous ne savons pas encore très bien quelle sera l’impact des énergies fossiles non-conventionnelles sur le flux mondial d’énergie utile. Il y a à ce sujet des prévisions hypothétiques, certaines plutôt optimistes, d’autres pessimistes. La figure 6-6 montre que, quel que soit l’hypothèse, optimiste ou pessimiste, le pic du flux d’énergie utile se situerait de toute façon dans la deuxième partie de ce siècle et que l’exploitation des énergies fossiles non conventionnelles ne déplacerait que peu ce pic. Il le serait de l’ordre de 30 à 35 ans dans le meilleur des cas, à seulement quelques années dans l’autre. La pente de la décroissance des flux d’énergie utile après les pics respectifs resterait elle toujours aussi pentue, de l’ordre de l’ordre de 2 à 4 %, ce qui voudrait dire une perte annuelle du flux d’énergie utile de l’ordre de 2000 à 6000 TWh/an.
Dans le 7ème exposé nous nous demandons si les techno sciences seront toujours en mesure de satisfaire les besoins énergétiques de l'ensemble des sociétés complexes mondialisés?
La réponse est certainement oui tant que le taux global d’extraction des énergies fossiles reste en croissance, c’est-à-dire au moins jusqu’à la deuxième partie de ce siècle. Au-delà du pic de ce taux d’extraction le problème pourrait devenir insurmontable.
Pour évaluer l’importance du défi à surmonter nous avons fait deux hypothèses raisonnables :
1°) Même après 2050, la survie de notre système économique mondial demandera un accroissement de flux d’énergie de l’ordre de 1500 TWh/an.
2°) la perte de flux d’énergie utile dans la deuxième partie de ce siècle serait au minimum de 2000 TWh/an.
Ainsi le génie humain devra au minimum compenser une perte annuelle de flux d’énergie de 3500 TWh/an par d'autres sources d'énergie, que nous appelons "sources d'énergies alternatives". C’est énorme ! A titre de comparaison cette accroissement serait actuellement de l’ordre de 300 TWh/an et celui attendu pour la prochaine décennie peut-être de l'ordre de 500 TWh/an. (Il est très difficile d’obtenir des valeurs non commerciales à ce sujet)
Si nous admettons comme raisonnables ces ordres de grandeurs, cela signifierait que l'industrie mondiale devrait être en mesure d'accroître, durant les 4 ou 6 prochaines décennies, le rythme de construction d’installations d’énergies alternatives, par un facteur d’environ 7, soit (3500/500), par rapport à ce qu’elle se sent capable de réaliser dans un proche avenir, ou par un facteur d'environ 12, soit (3500/300), par rapport à ce qu’elle peut produire aujourd'hui.
Peu probable que ce défi puisse être relevé en une période aussi courte que 40 ou 60 ans.
En résumé: Dès la deuxième moitié de ce siècle nous devrions nous attendre à une nette et durable baisse des flux d’énergie nécessaires à faire croître, fonctionner et entretenir l’ensemble des sociétés mondialisées.
Quelles en seront les conséquences ? Le système risque-t-il de s’effondrer par manque de flux d’énergie?
Le 8ème exposé se penche sur les risques encourus par notre civilisation si l’industrie mondiale était incapable de satisfaire les besoins mondiaux en énergie comme le suggère le 7ièm exposé.
Si cette prédiction devait se révéler exacte, nous devrions nous en inquiéter parce que cet événement aura un impact significatif et négatif sur les générations futures.
A quoi devrait-on s’attendre ? A ce que les futures générations reviennent au niveau de vie des années 50 ou 60, quand la consommation mondiale d'énergie était quatre fois plus faible que maintenant ? Pas si grave dirons certains. Le niveau de vie à cette époque n’était en fait pas si mauvais. Malheureusement ce n'est pas possible, car un système complexe est irréversible. En d'autres termes, les générations futures ne peuvent pas revivre ce que leurs ancêtres ont connu.
Peuvent-ils alors espérer que la complexité de notre civilisation diminuera suffisamment lentement pour permettre aux populations de s'adapter au nouveau flux d'énergie ? Cela pourrait bien être le cas au début de la décroissance des flux d'énergie. Mais, passé un certain seuil de manque chronique de ces flux, nos sociétés se détérioreront si rapidement qu’aucun ajustement ne sera plus possible. La civilisation se dégradera de plus en plus rapidement jusqu’à son effondrement total. Pourquoi ?
Parce que les flux d'énergie exogène consommés par la population mondiale peuvent être considérés comme des aides à l'existence. Cette aide se fait sous la forme de ce qu’on appelle parfois "les esclaves énergétiques". A partir d’environ 1850, l'humanité a commencé à exploiter de plus en plus massivement les combustibles fossiles. L'afflux croissant et rapide d'énergie exogène, qui a été absolument sans précédent dans l’histoire de l’humanité, a conduit à une augmentation proportionnelle des progrès techniques et sociaux (malheureusement pas toujours équitablement répartis). Toutefois, n’oublions pas que si des avancées techniques spectaculaires ont pu être réalisées, c’est parce que les " esclaves énergétiques " ont libéré certains humains de leurs dures tâches quotidiennes nécessaires à leur survie. Par conséquent, les progrès techniques ont suivi la même courbe ascendante que le taux annuel d'extraction des combustibles fossiles, en particulier celui du pétrole. Cette offre de flux énergétique exogène a permis d'améliorer notre alimentation, notre gestion de l'eau potable et des eaux usées, de rendre plus confortable et plus salubre nos habitats, de nous transporter rapidement d’un point à un autre sans grandes difficultés, etc., etc.. L’augmentation de nos connaissances en biologie, en médecine, en hygiène ainsi que dans les domaines de la chimie et de la physique ont conduit à une meilleure compréhension de la façon de lutter contre nos pires prédateurs (les bactéries et les virus) et de nous en protéger. Les progrès en technologie médicale ont permis de guérir des maladies autrefois incurables. Des progrès dans la production et la distribution alimentaire ont permis de réduire d’une manière significative les famines. Tout cela grâce aux « esclaves énergétiques »
C'est donc toutes ces avancées technologiques qui ont contribué à considérablement augmenter l'espérance de vie moyenne à la naissance de la population mondiale, ce qui a eu pour effet de l’augmenter.
Nous avons vu dans le 6ème exposé que le génie humain ne sera vraisemblablement pas en mesure de produire un flux d'énergie toujours croissant permettant cette croissance d'activité. Ce flux passera par un maximum (Figure 6-3) puis diminuera inexorablement, probablement déjà au cours de la seconde moitié de ce siècle. Le taux annuel de cette baisse pourrait être de l'ordre de 2 à 4%. A partir de ce moment, le nombre d'aides à l’existence, à savoir nos "esclaves énergétiques ", nous délaisseront les uns après les autres. Résultats: les structures sociétales des prochaines générations seront sérieusement endommagées, entraînant dans un premier temps des agitations sociales plus ou moins fortes, d’abord en différents points du globe pour se généraliser petit à petit à l'ensemble des sociétés complexes mondialisées. Les problèmes qui se feront de plus en plus pressants pour les prochaines générations seront de pouvoir remplir leurs assiettes chaque jour, d’avoir un accès facile à l'eau potable, de recevoir des soins en cas de maladie, de se déplacer sur de grandes distances pour trouver du travail ou de la nourriture, etc. De même, ils verront que les structures de la société seront de moins en moins capables d'assurer des emplois rémunérés, de distribuer des compensations pour les chômeurs, ni protéger la population contre les épidémies et autres fléaux. Ainsi, logiquement, l'espérance de vie moyenne des générations futures devrait progressivement diminuer et donc aussi la population mondiale. A priori, du fait que cette dernière suive le même schéma que celui des flux d'énergie consommés, nous pouvons craindre qu’une fois passé leur taux d’extraction maximum, la population mondiale diminuera chaque année d'au moins 2 à 4%. Supposons que, lorsque ces flux d'énergie vont commencer à diminuer, la population mondiale aura atteint 9 milliards d’individus. Si la diminution de la population annuelle moyenne devait être de l'ordre de 3 %, la population mondiale ne compterait pas plus d'un milliard d’individus en moins de trois générations (75 ans). Il est même possible que cette baisse soit encore plus brutale car elle est susceptible de s’accélérer par la destruction de structures économiques et sociales ainsi que des régimes d’Etats de droit.
En conclusion:
La question initiale était: Quels sont les risques encourus par notre civilisation si l’industrie mondiale est incapable de satisfaire les besoins mondiaux en énergie? La réponse est: une dégradation progressive de la complexité de notre civilisation mondiale conduisant à son effondrement.
Nous allons dans le 9ème exposé illustrer ce processus de destruction au sein d'un espace économique donné.
Dans un premier temps, la baisse des flux d'énergie peut avoir des effets semblables à ceux d'une récession économique, mais la comparaison s'arrête là, car les mécanismes en jeu sont différents. Les récessions économiques font généralement suite à une crise financière ou à l’éclatement d'une bulle d’un des secteurs économiques. Mais en général, ces crises ne sont pas liées à l'incapacité de produire en raison du manque de machines, de travailleurs, de matière première ou d’énergie. Le plus souvent elles prennent naissance quand l'offre est supérieure à la demande.
La situation est tout à fait différente lorsqu’une récession se transforme en dépression à cause d’une diminution permanente des flux d'énergie nécessaires au bon fonctionnement des sociétés. Dans ce cas, c’est la demande qui ne peut plus être satisfaite. La dépression se manifeste alors par le ralentissement toujours grandissant du triplet travail-production-consommation par faute d’énergie (et de matière première). Si, dans une crise économique, il est toujours possible de stimuler la consommation en injectant des capitaux créé à partir de rien, c'est-à-dire, en faisant marcher la machine à billet, il n'est pas possible de le faire avec l'énergie. En effet, comme nous l'avons vu dans le 4ème exposé, il n’est pas possible de créer de l'énergie à partir de rien.
Il n'y a donc pas de remède pour maîtriser ou atténuer ce type de récession qui va inévitablement converger vers une dépression économique permanente.
La baisse annuelle des flux d'énergie exogène, qui pourrait être de l'ordre de 2 à 6%, une fois le pic passé, se traduira par une augmentation immédiate du coût de l'énergie (toutes sources confondues), puis par une diminution progressive de la plupart des activités rétribuées dans les différents secteurs économiques.
Dans un premier temps, l'effet sera une augmentation du coût de la vie pour tout le monde avec une diminution correspondante de la consommation. Graduellement et progressivement, la baisse des flux d'énergie va entraîner la fermeture des grandes, moyennes et petites entreprises. De même, les services publics et tous autres services du tertiaire devront dans un premier temps licencier de plus en plus massivement puis, pour certains, fermer leur porte. Le taux de chômage grimpera en flèche. La diminution des activités salariées va faire dégringoler le PIB et simultanément les recettes de l’État. Les premiers affectés seront certainement les services sociaux. L’État deviendra donc de moins en moins efficace pour aider des foules de plus en plus dans le besoin par pertes de leurs revenus.
L'État sera alors obligé d’augmenter les impôts de ceux qui ont encore des revenus et des richesses. Afin de ne pas déclencher d’émeutes, l'État tentera d'emprunter autant que possible afin de relancer l'économie. Il ne trouvera malheureusement que peu de bailleurs de fonds prêts à risquer leur argent ou alors seulement à des taux très élevés. Le cercle vicieux de la dette et du ralentissement économique va commencer. Par la force des choses, même si, à ce moment, il y aura encore des régimes de gauche, nous devrions nous attendre à une forte réduction des prestations sociales pour les pauvres dont le nombre ne cessera d'augmenter. Les troubles sociaux qui en résulteront augmenteront la perte des libertés individuelles de chacun.
Le fossé entre riches et pauvres ne fera que se creuser d’avantage attisant encore plus l'instabilité sociale. Le marché noir, les grèves, les actes de vandalisme, les troubles civils, le banditisme, les abus de confiance et les escroqueries de toutes sortes seront en forte hausse. Le sentiment d'insécurité, la méfiance de chacun envers les autres se développera progressivement, rendant la vie quotidienne insupportable. Parce que tous ces facteurs sont absolument défavorables au développement économique, la dégradation de la situation ne fera que s’amplifier.
Les libertés individuelles vont se rétrécir comme peau de chagrin. Ce ne sera toutefois pas là une solution car les gouvernements vont devoir plier sous les dépenses pour contenir le peuple. L’augmentation des effectifs de la police, des troupes spéciales anti-émeute, la multiplication des lieux de détention vont coûter très cher. Peut-être même devra-t-il mobiliser des troupes à ses frontières pour se protéger d’agressions extérieures ou d'immigration massive et sauvage venant de régions encore plus défavorisées. L'argent dépensé pour maintenir ce semblant d'ordre se fera bien sûr au détriment du bien-être social, accélérant encore la destruction de structures privées et publiques. Certains organismes privés, certains professionnels, chercheront à se délocaliser, aggravant encore un peu plus la situation. Plus les années passeront, plus l'État deviendra exsangue financièrement, le forçant à limiter encore davantage ses dépenses pour l'aide au commerce, à l'industrie, à l’agriculture, à l’éducation, à la santé, à la prévention des épidémies, à l'aide au logement et de la famille. La différence de qualité de vie entre une minorité de privilégiés et une énorme foule de gens de plus en plus affamée, maltraitée, humiliée, désespérée, perdant toute confiance envers leur gouvernement, va atteindre son paroxysme et entrainer des révolutions sanguinaires.
Bien qu'il soit difficile de donner un scénario exact de ce qui pourrait arriver au juste, on peut imaginer qu’à ce stade, nous avons deux sortes de possibilités:
Première possibilité: Les révolutions ne résoudront rien. Elles seront suivies par d'autres révolutions toutes aussi désastreuses. Une multitude de seigneurs de guerre et de terroristes de toutes sortes vont se battre les uns contre les autres avec, comme conséquence, la destruction presque totale des structures de notre civilisation. On assistera vraisemblablement à un exode massif des populations, ainsi que des biens et des services. Tous vont essayer de converger vers les régions qui apparaissent en mesure de leur offrir une meilleure chance de survie. Ce faisant, ils pousseront leur région d'origine encore un peu plus vers le chaos, tout en affaiblissant les régions où ils auront choisi d’immigrer.
Les structures fournissant l'énergie, les matières premières minérales, les matériaux utiles, la nourriture et l'eau potable seront sérieusement endommagés. Cela devrait conduire à la résurgence de maladies infectieuses telles que la tuberculose, le choléra, la poliomyélite, l'hépatite virale, la peste, la lèpre, la fièvre jaune et bien d'autres encore. Les maladies sur lesquelles se concentrent aujourd'hui la recherche médicale, comme les cancers, les maladies cardiovasculaires et les maladies neurologiques, tels Alzheimer, ne représenteront plus un problème majeur car ces maladies dégénératives touchent essentiellement les populations âgées qui, à ce moment, se feront de plus en plus rares.
Souvenons-nous que nos systèmes complexes ne fonctionnent bien que si, comme il a été dit ici à plusieurs reprises, ils reçoivent les flux adéquats d’énergie et des matières premières. Mais ce n'est pas tout. Il faut encore que tout le monde soit présent à son poste de travail et avoir les qualifications requises pour faire son travail correctement. L'agitation sociale, l'augmentation de l'absentéisme dû aux maladies et au manque de soins, la désintégration du système de formation professionnelle et de toute l'infrastructure éducative, conduira à une situation où de moins en moins d’individus hautement qualifiés seront présents sur leur lieu de travail. Les conséquences économiques seront désastreuses, mais les conséquences écologiques le seront encore plus. En effet, imaginons ce qu’il pourrait arriver, par exemple, aux centrales nucléaires en l'absence d’un personnel suffisant et qualifié pour garantir un certain niveau de sécurité. La même chose vaut pour la sécurité aérienne, la sécurité alimentaire et de la qualité de l’eau, la sécurité du stockage des marchandises dangereuses, l'élimination et le recyclage des déchets de toutes sortes, etc. Des catastrophes du genre de Seveso, Bhopal, Tchernobyl ou Fukushima sont susceptibles de devenir nettement plus fréquentes. Il faut aussi s'attendre à d’autres désastres dus à d’importantes coupures de courants électriques provenant de déséquilibres dans les réseaux électriques. Ces black-out sont susceptibles de devenir de plus en plus fréquents, de plus longues durées et concerner des régions de plus en plus étendues. Ils entraîneront à leur tour d’autres désastres.
Parce que dans un système complexe tout est lié, le délitement d'une structure entraine nécessairement le délitement d’une autre et ainsi de suite accélérant ainsi le mouvement de destruction généralisée. A ce stade, il ne sera plus possible d'inverser la tendance. Il sera même trop tard pour l'arrêter. Tout va inexorablement évoluer vers la destruction complète du système.
Deuxième possibilité. Certaines puissances économiques et industrielles, non encore dans la tourmente, peuvent craindre des immigrations massives de populations en détresse et une destruction indirecte de leur système économique. Pour s’en protéger, ils pourraient procéder à une invasion «préventive» des zones en détresse et les coloniser à leur propre avantage. Toutefois, en raison d'un flux global d’énergie de plus en plus faible, il ne sera plus possible, comme aujourd'hui, de reconstruire les pays envahis puis les transformer en un fidèle partenaire commercial. L’envahisseur ne pourra agir que comme un colonisateur et traiter les populations soumises que comme des esclaves. Il utilisera ce qui reste de la richesse de ces pays à son profit exclusif.
Ce genre de situation risque de durer aussi longtemps que l’envahisseur reste fort sur tous les fronts. Au moindre signe de faiblesse, les populations soumises se révolteront en détruisant tout, jusqu'à ce qu’une autre puissance intervienne pour mettre tout le monde sous son autorité. Ainsi, étape par étape, le chaos va s'étendre à différentes parties du monde civilisé. Le commerce mondial, sur lequel est basé la prospérité de notre civilisation industrielle ne sera plus possible dans ce monde chaotique. Il y a un risque que les dernières grandes puissances encore préservées, cherchent à imposer leur suprématie pour dominer le globe entraînant le monde entier dans une guerre apocalyptique qui mettrait un point final à cette civilisation et peut-être même à l’humanité.
Bien que ces deux scénarios ne soient pas certains, ils sont loin d'être impossibles, surtout si rien n'est fait pour les prévenir. Quoi qu'il en soit, ce qui pourrait arriver dans l'avenir n'est pas quelque chose que nous pouvons prouver ou réfuter. Le seul fait que ce qui a été décrit ici soit du domaine du possible, nous oblige à évaluer cette probabilité et appliquer le principe de précaution. L’enjeu est trop élevé pour ne rien entreprendre.
Les arguments pour ne pas croire à une telle catastrophe sont souvent le reflet de nos peurs et de nos lâchetés devant des dangers qui nous dépassent. Nous préférons les nier plutôt que d'y faire face. Et puis, il y a notre foi inébranlable dans les miracles, que ce soit ceux que Dieu pourrait nous gratifier dans sa grande miséricorde ou, plus communément de nos jours, grâce au génie humain qui, s’il est capable d’être à l’origine de catastrophes, il aurait aussi le pouvoir de les réparer. L'argument suivant est fréquemment avancé: «L'histoire nous a montré que nous ne pouvons pas prévoir longtemps à l'avance ce que le génie humain peut encore nous réserver pour nous sauver. Ainsi, faisons lui confiance et arrêtons de faire des prédictions non constructives qui minent le moral de tout le monde."
D'où la question: Et si le génie humain était en effet capable de garantir en permanence le flux d'énergie suffisant pour que notre civilisation puisse continuer à se développer ad aeternam. Serait- elle sauvée pour autant?
Le 10ème exposé cherche à répondre à cette question.
Rappelons-nous le 1er exposé où il était dit que :
Tout nouveau système complexe (appelé «enfant») prend nécessairement naissance sur un autre système complexe (appelée «parent»), sur lequel il tirera son énergie et ses ressources matérielles pour se développer.
Le « système complexe-parent » de toutes les sociétés humaines (est la biosphère. Ce duo parent-enfant (biosphère-sociétés humaines civilisées) interagit étroitement l'un avec l’autre. Le « système complexe – parent » a généralement suffisamment de moyens pour éviter que le « système complexe-enfant » ne dépasse certaines limites qui le mettrait en danger.
La complexité des sociétés humaines a pu croître grâce à l'énergie et à la matière première extraites de la biosphère, ce qui signifie que la croissance de la complexité des sociétés humaines s'est faite aux détriments de la biosphère.
Si les sociétés s’étaient limitées à n’utiliser que l'énergie endogène humaine, comme dans les sociétés non complexes, leur impact sur la biosphère ne serait pas devenu une nuisance. Bien au contraire.
Il en va tout autrement quand les sociétés humaines devenues civilisées se sont détachées des lois de la Nature et se sont crues autorisées à puiser allègrement dans la biosphère les énergies et les matériaux dont elles avaient besoin pour satisfaire l’orgueil et l’ego de quelques un de ses représentants.
Les mécanismes par lesquels ces sociétés vont perturber l’environnement sont extrêmement nombreux. Nous allons essayer de les classer en catégories, mais il faut garder en mémoire qu’elles ne forment en aucun cas des ensembles disjoints. Supprimer un seul de ces mécanismes nuisibles entrainerait un déséquilibre qui endommagerait ou même détruirait l’ensemble de la civilisation.
Parmi les dommages causés à la biosphère par l’Homme civilisé citons par exemple:
Ceux causés par une population mondiale toujours croissante.
Nous avons discuté dans le 8ème exposé que l’augmentation de la population était en partie due à une augmentation de l'espérance de vie à la naissance, elle-même liée aux progrès techniques qui, à leurs tours, sont liées à l’augmentation du flux d'énergie exogène par personne. Tant que les techno sciences seront en mesure de répondre à cette demande de progrès, la population mondiale augmentera, du moins jusqu’à un certain point. A terme, le problème de nourrir correctement cette population mondiale, sans détruire gravement l'environnement, pourrait devenir un impossible défi. Ceci peut être vu comme une contre réaction de la biosphère.
Ceux causés par les abondantes transformations d'énergie primaire en énergie utile, et par celles de matière primaire en matière utile.
Nous avons vu dans le 4ème exposé que la transformation d’une énergie primaire en une énergie utile produisait une proportion considérable de produits non désirés. Ces produits vont envahir l’environnement et perturber la biosphère tout comme ceux issus de la transformation d’une matière première primaire en matière utile.
La pollution due à l’extraction des énergies fossiles est connue de quasi tout le monde car fortement médiatisée. Moins médiatisées sont les pollutions minières et le traitement des minerais jusqu’à obtenir le produit désiré. Des masses extraites des entrailles de la Terre, moins de 1% deviennent un produit utile. Le reste est déversé dans l’écosystème qui cachait dans son sous-sol le produit recherché par l’Homme. Ces déchets miniers contiennent de nombreux produits toxiques pour l’Homme tels les métaux lourds, l’arsenic, des matières radioactives et autres.
Mais l’agression à la biosphère ne s’arrête pas là. Il nous faut encore ajouter :
Ceux causés par l'utilisation des énergies utiles et des matières utiles
Le flux d’énergie utile et le flux de production de matières utiles vont venir nourrir le flux de la production industrielle nécessaire à la survie de notre civilisation. Par exemple l’industrie mondiale a déjà mis sur le marché des millions de produits physico-chimiques représentant des milliards de tonnes de produits plastiques, pharmaceutiques, cosmétiques, électroniques et autres. Selon le principe universel énonçant que rien ne se perd, rien ne se crée mais tout se transforme, ce qui a été fabriqué artificiellement se retrouvera, tôt ou tard, sous une forme ou une autre, dans l’environnement naturel. Beaucoup de ces produits sont toxiques pour les éléments et les structures de la biosphère tels les biotopes avec ses plantes, ses organismes biologiques et son réseau trophique, y compris bien sûr pour l’Homme. Ces produits artificiels ne restent pas là où ils ont été produits, utilisés ou jetés mais se déplacent sur de grandes distances par l’érosion, les animaux, les poissons, le vent, etc.. Certains, comme les métaux lourds, les PCB, les furanes, la dioxine, etc…, ont des demi-vies suffisamment longues pour permettre leur accumulation dans certains organismes, diminuant soit leur espérance de vie, soit entraînant carrément leur disparition. La contamination de ces organismes peut aussi les rendre impropres à la consommation et ainsi perturber la chaîne alimentaire dont, rappelons-le, l’Homme en est son dernier maillon.
Ceux causés par des espèces envahissantes exogènes.
Ces espèces, souvent bien malgré elles, dérèglent plus ou moins gravement plusieurs biotopes. Pour satisfaire les exigences de l’économie mondialisée, les échanges de biens, de services et de personnes ont nécessité un immense réseau de transport par mer, air et terre. Il faut savoir que chaque année plus d’un milliard de passagers effectuent des vols internationaux et que des milliards de tonnes sont transportés sur les mers et les océans. S’ajoute à cela d’autres milliards de tonnes de marchandises transportées par voie fluviale, par la route et le rail.
Dans les bagages des passagers et dans les marchandises transportées se trouvent, volontairement ou involontairement, des espèces potentiellement envahissantes telles des bactéries, des virus, insectes, animaux et plantes de toutes sortes qui sont autant d’éléments exogènes à leur point d’arrivée. Certaines de ces espèces peuvent devenir envahissantes et détruire ou perturber gravement des espèces indigènes du biotope récepteur.
Ceux causés par une surexploitation des ressources biologiques pour satisfaire la production mondiale alimentaire et sa distribution dans la population mondiale.
Les ressources biologiques qui constituent la chaine alimentaire, normalement renouvelables, sont exploitées avec une telle intensité qu’elles n’ont plus le temps de se reconstituer, qu’il s’agisse de terres cultivables, de forêts, de pêcheries, de pâturages ou de nappes phréatiques.
Il est estimé qu’au cours de ces 40 prochaines années, l’accroissement de 30% de la population humaine, occupant de plus en plus d’espace sur cette Terre, va faire perdre à lui seul 30% des terres cultivables. S’ajoute à cela les déséquilibres croissants du réseau trophique, en particulier par l’emploi massif d’intrants (engrais, désherbants, insecticides et pesticides) combinés à de mauvaises gestions des sols, en particulier en les laissant nus une bonne partie de l’année, entrainant leur salinisation et leur stérilisation à terme. Pour les mêmes raisons, de grandes surfaces de terres arables sont perdus par érosion.
Mais ce n’est pas tout. Les méthodes d’agriculture intensive ont tendance à appauvrir les sols par le non-respect des cycles naturels qui veut que la dégradation des végétaux serve à maintenir la quantité de nutriments absolument nécessaire au métabolisme des organismes tels par exemple, les oligoéléments (iode, fluor, fer, cuivre) et d’autres éléments comme le magnésium, le phosphore, le sélénium. Ces nutriments ne se retrouveront plus en concentration suffisante dans les plantes et donc dans notre alimentation. Ils jouent toutefois un rôle important pour notre santé. Ainsi, même si une alimentation pouvait sembler correcte en termes de calories, ou de quantité, elle peut être néanmoins équivalente à une malnutrition, si elle ne contient pas en suffisance ces éléments.
Parvenir à une production durable et mondialisée de la nourriture et de l'eau potable est devenue de plus en plus difficile en raison du nombre d'acteurs impliqués et leur interférence. En effet, les relations entre financiers, industries, producteurs, consommateurs et travailleurs deviennent terriblement compliquées en raison de nombreuses lois nationales et internationales. Celles-ci régissent les droits du commerce international et de la concurrence. Elles régissent encore la protection de la propriété intellectuelle sur les substances biologiques (comme les graines), les subventions aux agriculteurs, les règles sanitaires, la protection des travailleurs, etc. Elles imposent également des limites au commerce équitable, aux échanges Nord-Sud et à de nombreuses autres contraintes. Toutes ces limitations administratives rendent toute réforme rapide et profonde très difficile, voire impossible.
Plus grave encore est l’utilisation des terres agricoles et de ses produits comme de pures produits financiers et non plus comme des produits vitaux pour tout le monde. Les récoltes agricoles sont devenus des produits boursiers, et un marché juteux pour les Hedge Funds, les cartels des semenciers, des produits phytosanitaires et de l’industrie agroalimentaire ainsi que les industries spécialisées dans la transformation génétique des plantes (OGM). Cette politique entraîne déjà des famines dans certaines régions du monde, mais pourrait bien à terme se généraliser jusque dans les pays riches.
Exemples d'autres actions humaines endommageant la biosphère avec pour effet d’en réduire sa complexité.
- La destruction des forêts primitives
Les forêts primitives sont un haut lieu de complexité biologique tant par le nombre d’éléments, de structures, de liaisons, d’actions et de réactions biosphériques qu’elles contiennent.
2) L’assèchement de grandes zones marécageuses
De même les zones marécageuses et les tourbières sont des hauts lieux de complexité biosphérique. Parce que ces biotopes ne sont pas favorables au développement humain, ces derniers les ont détruits massivement. C’est là encore une lourde perte pour la complexité biosphérique.
3) La canalisation des cours d’eau et la régulation de leur débit
De même les rivières et les fleuves laissés à eux-mêmes avec leurs crues et leurs décrues, défavorisent la croissance de la complexité des sociétés humaines mais favorisent l’existence de nombreuse espèces et une grande diversité dans les biotopes. Leur canalisation, leur régulation par des barrages ont rendu la vie plus facile aux sociétés humaines mais a contribué à diminuer la complexité de la biosphère.
4) La création de grandes surfaces artificialisées
L’accroissement de la complexité des sociétés humaines a entraîné la construction d’habitats allant de la maison individuelle à la mégapole en passant par les villages et des villes plus ou moins grandes. Entre ces habitats, il a fallu construire des voies de communications allant du chemin vicinal aux autoroutes, en passant par les ports et les aéroports. S’ajoute à cela les surfaces artificialisées pour la production de biens et de services avec encore ses lieux de stockage, ses surfaces de stationnements, ses innombrables véhicules, l’aménagement des lieux de loisirs, etc. Tous ces lieux sont inertes au point de vue de la complexité biosphérique. La création de surfaces artificielles détruit les biotopes de deux manières. Le premier concerné est évidemment celui où sont implantées ces grandes surfaces. Mais beaucoup d'autres biotopes, parfois loin des surfaces artificielles deviennent les sources de matière brute pour leurs constructions et subissent ainsi de graves dommages. Citons à titre d’exemple, l'extraction d’énorme quantité de sable des rivières ou des bas-fonds marins pour les constructions en béton. Dans le processus de dragage du sable, tous les organismes qui y vivent sont détruits ainsi que des plages qui protègent l’intérieur des terres de l'érosion.
5) La transformation des surfaces naturelles en monoculture
Comme déjà discuté, afin de pouvoir nourrir des populations toujours plus grandes, les sociétés humaines ont dû abandonner les cultures vivrières au profit de vastes champs de monocultures intensives nettement plus pauvres en termes de complexité biosphérique.
6) La destruction de la biodiversité par la destruction d’espèces biologiques ou en diminuant nettement leurs constituants.
Il est bien connu, car répété dans tous les médias, que la biodiversité s'érode rapidement. Les activités humaines ont une grande part de responsabilité dans ce phénomène. Par définition, la perte d'espèces biologiques ou même leurs raréfactions contribuent à réduire la complexité de la biosphère, car elles diminuent le nombre de ses éléments (les individus d'une espèce donnée) et ses structures (les espèces). Réduire la complexité de la biosphère ne reste pas sans conséquence et peut, entre autre, changer le climat comme nous le verrons plus tard. En outre, la réduction de la biodiversité perturbe la chaîne alimentaire. Résultat: de nombreuses espèces, dont la nôtre, sont exposées directement ou indirectement à un risque d'extinction.
Une fois passé un certain seuil, mal connu de l'Homme, la biosphère va réagir contre le « système complexe-enfant », à savoir la civilisation mondiale. Ainsi:
La perte constante de la complexité biosphérique va déclencher plusieurs rétroactions qui s'opposeront à l'expansion de la civilisation.
Parmi ces rétroactions il y a celle largement reconnue: les changements climatiques.
Première rétroaction
Le fait que les activités humaines puissent modifier les climats ne devrait pas nous surprendre! Si les activités humaines modifient la biosphère en diminuant son niveau de complexité alors il est naturel que les climats changent aussi puisque dans la Nature tout est lié. Ce point est d'ailleurs en accord qualitatif avec ce que prédit la théorie des flux d'énergie dans les systèmes complexes.
Il est généralement admis que les changements climatiques auront des effets négatifs importants sur la taille de la population de nombreuses espèces innocentes, mais surtout sur la nôtre qui a déclenché cette rétroaction.
Politiciens et économistes craignent les changements climatiques car, d'après les prévisions du GIEC, ils induiraient de graves fléaux tels l'élévation du niveau des mers, des cyclones à répétition, des destructions de récoltes, etc. Les désastres matériels et humains pourraient déclencher un effondrement économique mondial, ce qu’ils ne peuvent accepter. Pour eux, la cause principale est l’augmentation des gaz à effet de serre anthropiques. Ces derniers alors investissent massivement dans la recherche et le développement pour diminuer cette concentration. Dans cette approche, il s’agit de remplacer les énergies fossiles par des énergies alternatives sans pour autant réduire le total des activités humaines. Outre le fait que, d’après le 8 ème exposé, ceci ne soit pas réalisable, notre système économique mondial ne nous permet pas de diminuer notablement la somme des activités humaines sans s’effondrer. Ainsi la contre réaction de la biosphère aura lieu d’une manière ou d’une autre. Soit la civilisation mondialisée s’auto détruit par manque de flux d’énergie, soit elle est détruite par les changements climatiques ou plus généralement par un changement du point d’équilibre de la biosphère qui détruira la civilisation industrialisée mondiale.
Mais les changements climatiques ne représentent pas la seule rétroaction de la biosphère contre la croissance de la civilisation.
Une autre rétroaction se déclenchera quand la demande de la civilisation mondialisée dépassera ce que la biosphère peut lui offrir sur le long terme.
Si le génie humain était capable d'alimenter en énergie, et d’une manière durable, l'ensemble des sociétés complexes mondialisées, il faudrait alors s'attendre à une augmentation constante de la population mondiale (voir 8ème exposé). Elle entraînera une augmentation de la demande en flux d'énergie utile et en flux de besoins vitaux comme la nourriture et l'eau potable.
Dès lors, il s'en suivra une rapide réduction de la population mondiale. Le système économique, qui ne peut survivre que s'il est en croissance, sera fortement ébranlé par manque de producteurs et de consommateurs solvables. Viendra alors s'ajouter une dépression économique toujours plus profonde qui conduira à des révoltes et à des guerres. Des mécanismes proches de ceux décrits dans 9ème exposé contribueront à l'effondrement de toute la civilisation mondiale.
Ainsi les rétroactions de la biosphère (le système complexe-parent) auront rempli leurs fonctions régulatrices. Elles auront réduit ou annulé les prétentions d'extension du système complexe-enfant (la civilisation). La biosphère se stabilisera vers un nouveau point d'équilibre dont notre civilisation, telle qu'elle fonctionne actuellement, sera exclue.
En conclusion :
Trouver de nouvelles sources d'énergie pour compenser les pertes d'énergies fossiles est loin d'être la solution, car cela ne réduira pas le montant des activités humaines qui est la cause première de la modification de la biosphère. Ainsi, vouloir maintenir ou pire accroître encore notre consommation d'énergie exogène conduira indubitablement à l'effondrement de notre civilisation.